6 – Samedi 8 mars à 20h15, Salle OB,
Carolyn Sampson, soprano
et l’Orchestre Baroque de Fribourg,
dir. et violon Cecilia Bernardini (concert n°23)
Deuxième concert de musique baroque, avec le Freibruger Barockorchester, un ensemble allemand qui joue sur instruments anciens, né en 1987. Carolyn Sampson est considérée comme l’une des meilleures interprètes britanniques de musique ancienne. Un programme au cœur du baroque européen à son apogée.
I – Georg Philipp TELEMANN (Magdebourg 1681 – Hambourg 1767)
Ouverture-suite en sol majeur pour cordes et basse continue, TWV 55:G2 « La Bizarre »
Telemann a laissé le plus important catalogue d’œuvres de l’histoire de la musique. Il entra au service du comte von Promnitz à Sorau (Lusace en Pologne) où il se familiarisa avec la musique française appréciée du comte. En 1712 il devint directeur de la musique de Francfort-sur-le-Main, et dès 1721, cantor au Johanneum de Hambourg puis Kapellmeister des cinq églises et directeur de l’Opéra du Marché des Oies. Il a composé des centaines de concertos, sonates, suites, messes et cantates, cinquante Passions, des dizaines d’opéras. Son œuvre la plus connue aujourd’hui est le recueil de pièces instrumentales Tafelmusik (musiques de tables) publié en 1733.
L’Ouverture-suite « La Bizarre » comprend : Ouverture, Courante, Gavotte en rondeau, Branle, Sarabande, Fantaisie, Menuet I et II, Rossignol.
II – Georg Friedrich HAENDEL (Halles 1685 – Londres 1759)
« Ah, mio cor », extrait d’Alcina, HWV 34
Nul besoin de présenter Haendel, le plus grand compositeur baroque allemand (après Bach bien sûr !) dont la carrière se développa en Angleterre, après qu’il eût vécu en Italie où il s’imprégna des plus hauts accomplissements de la musique italienne. Il arriva à Londres via la cour de Hanovre où il rencontre fils de l’électeur, le roi Georges II d’Angleterre. En dehors de belles pièces instrumentales, il triompha avec ses opéras tous en italien (39 nous sont parvenus) et ses oratorios.
Alcina fut créé en 1735 à Covent Garden. L’héroïne est une magicienne qui accueille sur l’île où elle règne Bradamante, travestie en homme sous les traits de son frère et accompagnée de son tuteur le magicien Melisso. Ils viennent délivrer Ruggiero, captifs d’Alcina dont elle est follement éprise. Au cours d’innombrables rebondissements, Oronte, chef des armées d’Alcina, l’avertit que Reggiero s’apprête à quitter l’île ; le désespoir sans borne de la magicienne s’exprime dans l’air « Ah mio cor, tradito sei ».
Ah! mio cor! schernito sei! Stelle! Dei! Nume d’amore ! Traditore! T’amo tanto ; puoi lasciarmi sola in pianto, oh dei! Perché ? | Ah, mon cœur ! Tu es bafoué ! Étoiles ! Dieux ! Esprit d’amour ! Traître ! Je t’aime tant ; tu peux me laisser seule à pleurer, Oh dieux ! pourquoi ? |
Ma, che fa gemendo Alcina? Son reina, è tempo ancora: resti o mora, peni sempre, o torni a me. | Mais que fait gémir Alcina ? Je suis reine, il est encore temps : reste ou meurs, blessé à jamais, ou reviens à moi. |
III – Henry PURCELL (Londres 1659 – Westminster 1695)
Curtain tune, extrait de Timon d’Athènes, Z.632
Le génial Purcell,surnommé l’Orpheus Britannicus, travailla toujours au service de la cour et de l’Église d’Angleterre. Organiste, il avait obligation de composer pour les fêtes religieuses et profanes. Il a donné quarante musiques de scène, et des opéras, dont Dido and Anea, King Arthur, The Fairy Queen. Il succomba à la tuberculose à l’âge de trente-cinq ans.
En 1694, Purcell écrivit la musique de scène d’une pièce de Thomas Shadwell d’après Shakespeare. « Le riche Timon vit entouré de flatteurs qui profitent de ses largesses. Acculé à une situation sans issue, il compte en vain sur ceux qu’il avait comblés et organise un dernier festin… Il s’enfuit alors pour mener dans une caverne une vie solitaire, jusqu’au jour où il découvre un trésor qu’il distribue avec malignité aux adversaires d’Athènes. » Le Curtain tune est un « masque », intermède dansé pendant le festin. C’est un ground, une basse obstinée, spécialité de la musique anglaise et surtout de Purcell.
IV – Henry PURCELL (Londres 1659 – Westminster 1695)
« Mad Bess of Bedlam », Z.370
Bess of Bedlam fait partie des mad-songs (chansons de fous) un genre dont il existe de nombreux exemples dans la musique anglaise, parfois connue sous le titre de « From silent shades » pour soprano solo et basse continue. Ces chansons simples et émouvantes pouvaient être données dans les appartements royaux. Elle raconte la folie d’une jeune veuve, Bess, et fut publiée en 1683. Bess of Bedlam présente évidemment un lien direct avec l’hôpital psychiatrique londonien. Bess y pleure son mari disparu. Elle semble avoir des hallucinations, car elle se trouve dans les mythiques Champs-Élysées, où elle finit par faire son deuil. Il est fascinant de voir comment le compositeur parvient à mettre le texte en musique. En cinq minutes seulement, cette chanson nous plonge dans douze atmosphères différentes, alternant entre aria et récitatif, mais contrastant aussi sur les plans rythmique et harmonique, pour souligner l’oscillation inexorable entre espoir et désespoir. Si la musique baroque est, par définition, riche en contrastes, cette pièce dense et immensément variée semble constituer une version musicale de la miniature picturale.

From silent shades and the Elysian groves
Where sad departed spirits mourn their loves
From crystal streams and from that country where
Jove crowns the fields with flowers all the year,
Poor senseless Bess, cloth’d in her rags and folly,
Is come to cure her lovesick melancholy.
« Bright Cynthia kept her revels late
While Mab, the Fairy Queen, did dance,
And Oberon did sit in state
When Mars at Venus ran his lance.
In yonder cowslip lies my dear,
Entomb’d in liquid gems of dew ;
Each day I’ll water it with a tear,
Its fading blossom to renew.
For since my love is dead and all my joys are gone,
Poor Bess for his sake
A garland will make,
My music shall be a groan.
I’ll lay me down and die within some hollow tree,
The rav’n and cat,
The owl and bat
Shall warble forth my elegy.
Did you not see my love as he pass’d by you?
His two flaming eyes, if he comes nigh you,
They will scorch up your hearts: Ladies beware ye,
Les he should dart a glance that may ensnare ye!
Hark! Hark! I hear old Charon bawl,
His boat he will no longer stay,
And furies lash their whips and call:
Come, come away, come, come away.
Poor Bess will return to the place whence she came
Since the world is so mad she can hope for no cure.
For love’s grown a bubble, a shadow, a name,
Which fools do admire and wise men endure.
Cold and hungry am I grown.
Ambrosia will I feed upon,
Drink Nectar still and sing. »
Who is content,
Does all sorrow prevent?
And Bess in her straw,
Whilst free from the law, In her thoughts is as great, great as a king.
V – Francesco DURANTE (Frattamaggiore 1684 – Naples 1755)
Concerto n°8 en la majeur, « La Piazza »
Issu d’une famille de musiciens napolitains, il fut à Rome l’élève de Pitoni et de Pasquini. Il devint enseignant dans les divers conservatoires de Naples. À son école, furent formés entre autres Pergolèse, Piccinni (son préféré), Sacchimi, Guglielmi. Il vécut probablement aussi à Rome vers 1718 et voyagea selon la tradition en Saxe. Il est considéré comme le fondateur de l’école napolitaine, car il fut le maître des plus célèbres compositeurs dramatiques d’origine napolitaine. Mais il n’écrivit pas pour le théâtre et se consacra à la musique spirituelle et instrumentale, dans laquelle il se révèle original. Son talent réside dans l’élégance, la clarté, la légèreté, ainsi que dans la volonté d’unir la tradition baroque au nouveau style des maîtres vénitiens dans ses concertos.
Le Concerto en la majeur est surnommé la Piazza (la folie). Il comprend trois mouvements, dont le premier est particulièrement expressif dans son alternance de vivacité et de mélancolie :
- Allegro – Affettuoso – Allegro – Andante – Allegro – Affettuoso – Allegro – Affettuoso -Andante
- Affettuoso
- Allegro




Saurez-vous reconnaître les quatre compositeurs de ce concert ?